De l’herbe dans les toilettes et l’infâme Garua

16 August 2013

Le temps est lourd, lourd. Moite et humide. On savait, pourtant, qu’à Lima, le climat était mauvais.

Ça date de toujours, ce temps invivable. Pizzaro, le grand Pizzaro, le conquistador espagnol s’était déjà fait avoir. En arrivant là, les Incas lui avaient refilé cette partie du pays, parce qu’ils ne voulaient pas y vivre eux même. Aujourd’hui Pizzaro n’est plus, mais le garua règne toujours. Immonde brouillard humide et bas qui donne envie de fuir la ville au plus vite…

Nous n’y sommes pas pour longtemps. 2 jours à peine. Hier, nous étions dans le bus, et avant-hier encore, à Arequipa. Nous faisons route vers le nord, et Lima n’est qu’une étape avant Huaraz, où nous passerons quelques jours. Avant-hier nous avons dormi dans le bus, et hier, nous n’avons pas dormi dans notre guesthouse, trop bruyante, et trop chaude. Notre linge, lavé depuis 3 jours peine à sécher, il pendouille lamentablement au milieu de la pièce. Le taux d’humidité flirte nonchalamment avec les 100 %.

Mais aujourd’hui, il faut repartir. Ce soir, on dormira dans le bus. Peut-être. Dans le bus, oui, c’est certain, mais dormir ? Aujourd’hui, il faut errer, errer dans la ville moite, en attendant notre bus, ce soir, tard.

Nous sommes dans le quartier de Miraflores, alors on va voir la mer. On marche quelques mètres qui nous paraissent des kilomètres, abrutis, assommés sous les coups de l’infâme Garua. Il faut monter, descendre et remonter encore, je m’arrête à bout de souffle pour contempler l’Océan. Ce n’est pas le plus beau qu’on ait vu. C’est drôle, parce que c’est le même qu’en Australie, et pourtant ici, il est terne. Gris, vert, et colérique. Triste. Dans ses eaux s’échinent quelques surfeurs qui se la racontent un peu, et ça, par contre, c’est un peu comme en Australie.

On n’y reste pas longtemps, sur la plage de cailloux. On retourne vers la ville, errer un peu, manger peut être. Quand la fatigue est là, c’est dur de se motiver à visiter une ville.

Dans la rue principale, le garua nous lâche enfin, et l’air devient plus respirable. Il fait juste chaud, mais moins humide. Un homme nous aborde, des éventails plein les mains. Il nous en tend un, nous interroge, est-ce qu’on en veut un ? Par habitude, on dit, non, d’abord. Nous continuons notre route, on a faim, et cette fois pour de bon. Nous nous arrêtons ici et là pour consulter la carte des restaurants, et du coin de l’œil, on voit le vendeur d’éventails qui nous fait encore des signes.

Assis à la terrasse d’une petite gargote de la rue principale, nous respirons enfin. Moi je sais que je vais manger un ceviche, et Julien s’amuse de la foule qui nous entoure, de la joie, du soleil, de notre voyage. Le gars aux éventails nous voyant sourire tente une nouvelle approche, est-ce qu’on en veut un ? Avant même qu’on puisse lui répondre, le serveur le dégage à grands gestes.

J’attends mon ceviche, Julien déguste sa bière, le repos est mérité. Dans mon dos, l’homme revient et fait des gestes à Julien. Amusée, je dis qu’on pourrait peut-être lui prendre un éventail. Après tout, il fait chaud, ça servira, et puis ça fera toujours un souvenir. Alors, Julien commence à négocier. L’homme annonce un prix fort, 5 € pour un éventail en papier, mouais. Le prix baisse à 3 €, car plus bas, l’homme et sa famille mourrait de faim. Même si on trouve ça cher, on prend. On sait, on sait, qu’il ne faut pas abuser en négociant des prix trop bas. Il faut respecter les locaux.

Julien tend son billet et l’homme, un éventail. L’échange est étonnant et parait difficile. L’homme prend le billet mais ne lâche pas l’éventail : Julien sent qu’il est en train de se faire avoir. Il tire, tire et l’objet tant souhaité tombe enfin sous mon nez, sur la table. Je ramasse l’éventail avec la satisfaction d’une fillette qui recevrait une nouvelle poupée : j’adore les petits objets qui ne ressemblent à peu près à rien.

Dans le même temps, l’homme a disparu très vite, furtivement, en courant. Je remarque alors que mon éventail est déchiré : déception, on s’est fait avoir. Je m’apprête à râler tandis que mes yeux tombent finalement sur un objet que je n’avais pas encore vu.

Tombé là, sous mon nez, en même temps que l’éventail git en effet un sachet transparent. Rempli d’herbe. De la weed.

Nous sommes à Miraflores, le quartier est animé, et la terrasse de notre restaurant est en plein milieu de la rue principale. Nous avons laissé l’infâme garua près de l’océan et maintenant, nous avons de l’herbe plein les mains. Je savais bien, qu’il était cher, cet « éventail »!

Immédiatement nous arrivent en tête les images de ces touristes qui se font arrêter pour possession de drogue. Emprisonnés dans des conditions lamentables, loin de leur pays. On ne connait pas la loi péruvienne, mais on imagine fort bien que se faire transmettre ainsi un paquet de weed aux yeux de tous n’est pas une très bonne idée. Les carabiniers ne sont jamais bien loin.

Après le garua, c’est la trouille qui nous étouffe … 

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Je voyage autant que possible avec mon amoureux et nos 2 enfants. Sur ce blog, vous trouverez aussi bien nos récits de voyage que des conseils pour bien préparer les vôtres. Dans la vraie vie, je suis aussi rédactrice web SEO, contactez-moi si mes compétences vous intéressent!

23 comments

  1. Comment by LadyMilonguera

    LadyMilonguera Reply 16 August 2013 at 17 h 42 min

    je comprends mieux… ça me paraissait cher pour un simple éventail en papier quand même…

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 17 August 2013 at 16 h 20 min

      Oui, en effet ;)

  2. Comment by Philippe

    Philippe Reply 16 August 2013 at 18 h 36 min

    Je le savais que tu avais la main verte, mais à ce point tout de même. :)

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 17 August 2013 at 16 h 19 min

      T’as vu, je sais transformer un éventail en sachet d’herbe!

  3. Comment by Curiosités à NY

    Curiosités à NY Reply 16 August 2013 at 19 h 41 min

    Du coup, il était vraiment pas très cher cet éventail!!!
    Et moi je salive devant le ceviche/pisco sour! Duo de choc!

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 17 August 2013 at 16 h 19 min

      Non, en effet, c’est “l’éventail” le moins cher qu’on ait vu…! Le Ceviche péruvien est un délice, une belle découverte de notre voyage!

  4. Comment by Laurent

    Laurent Reply 17 August 2013 at 0 h 14 min

    Attention, ne pas ouvrir le sachet tout en agitant frénétiquement l’éventail, ça serait gâcher !!

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 17 August 2013 at 16 h 21 min

      En effet, de l’herbe éventée, ça n’a plus trop d’intérêt!

  5. Comment by Haydée

    Haydée Reply 17 August 2013 at 16 h 07 min

    J’ai vu Lima sous un tout autre aspect. Grand soleil, un ciel plus bleu que bleu.
    Ma question : On vous vend de la drogue sans même que vous le sachiez, bizarre … Ils sont fous ces péruviens… Qu’en avez-vous fait ? ;)

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 17 August 2013 at 16 h 17 min

      Elle a fini dans les toilettes. J’imagine qu’à Lima, le coup est connu, que quand on veut de l’herbe, on cherche le vendeur d’éventail… Forcément, nous, on ne pouvait pas savoir!

    • Comment by Haydée

      Haydée 17 August 2013 at 16 h 41 min

      Autant pour moi, j’ai mal lu le titre … :p

  6. Comment by Benoit(novomonde)

    Benoit(novomonde) Reply 18 August 2013 at 9 h 45 min

    Drôle de couverture pour un vendeur d’herbe ;-)… Mais c’est bon à savoir… on se méfiera des vendeurs d’éventails ;-)

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 19 August 2013 at 22 h 45 min

      Oui, et vous nous direz, si vous le voyez!

  7. Comment by Mélissa

    Mélissa Reply 19 August 2013 at 23 h 21 min

    Pour le original, la couverture de la vente d’éventail… Je me demande s’il n’y a pas aussi le fait que les locaux pourraient associer les “gringos” avec la consommation d’herbe…

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 20 August 2013 at 20 h 07 min

      Peut être, oui Mélissa! En tous cas, nous on n’avait rien compris, et surtout rien vu venir. C’était un sacré malentendu ;)

  8. Comment by Anne @ CaminoNomada

    Anne @ CaminoNomada Reply 21 August 2013 at 12 h 15 min

    Au moins cet éventail ne vous a pas attiré d’ennuis :-) Moi j’ai failli passer une journée à Lima (14h de correspondance en route pour le Chili), mais la jeune femme informant les touristes était juste désespérante : “n’y allez pas, là c’est dangereux, là il y a beaucoup de vols, faites très attention, prenez un taxi, ne prenez surtout pas le bus urbain ou vous vous perdrez, je ne vais pas vous expliquer vous n’allez pas comprendre…” Moi je veux bien, mais les taxis étaient incroyablement chers, comme la consigne pour nos bagages d’ailleurs. Le plus drôle c’est qu’avec Benjamin qui est chilien, c’était bizarre de s’entendre dire qu’on ne capterait rien. Bref, Lima, c’est pas ça !

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 22 August 2013 at 14 h 43 min

      Ah oui, alors nous aussi avons eu énormément de mises en garde lors de notre voyage au Pérou, c’est en effet assez déconcertant. Alors que nous étions sur nos gardes “juste comme il faut”, les locaux nous abreuvaient de conseils et d’avertissements: ça en devenait flippant… c’est bizarre et en même temps je ne sais pas bien s’il y a là bas réellement plus d’ennuis envers les touristes que dans tous le reste de l’Amérique du sud?…

  9. Comment by Haydée@Travelplugin

    Haydée@Travelplugin Reply 22 August 2013 at 14 h 48 min

    Les péruviens sont des flipettes c’est tout ;)

    Plus sérieusement, ils se font attaquer eux-mêmes d’où leur mise en garde. Beaucoup d’entre eux me l’ont dit et je n’ai compris cela qu’après m’être fait avoir par les bandits …

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 22 August 2013 at 16 h 28 min

      :)
      Oui, on a lu votre terrible histoire d’agression, ça fait froid dans le dos. Justement, avant de partir et de notre point de vue d’occidentaux, on n’avais jamais entendu de mise en garde particulière à propos du Pérou, alors qu’on entend beaucoup plus d’histoires sur la Colombie qui ne serait pas un pays “sûr”. Toi qui a voyagé dans ces deux pays, que peux tu en dire?

    • Comment by Haydée@Travelplugin

      Haydée@Travelplugin 22 August 2013 at 16 h 57 min

      La Colombie, c’était après le Pérou donc nous étions plus sur nos gardes. Du coup, c’est difficile à dire il faudrait que je vive un peu plus longtemps dans chacun d’entre eux pour me rendre compte.

  10. Comment by Leslie@Voyage Perou

    Leslie@Voyage Perou Reply 22 August 2013 at 16 h 00 min

    Mmm un cevichito!
    Lima est située sur un désert qui reçoit l’humidité de l’Océan et la garde malheureusement à cause des montagnes des Andes qui l’entourent. Mais l’hiver, Lima est pire que grise, il faut y aller l’été au moins, quand il y a du soleil! ;)

    • Comment by Nowmadz

      Nowmadz 22 August 2013 at 16 h 25 min

      Oui, tu as sans doute raison pour le temps. On avait mal “calculé” sur ce coup là, et c’est vrai que la météo au mois de mars nous a passablement gâché notre voyage au Pérou…dommage!

  11. Comment by Amandine

    Amandine Reply 25 August 2013 at 11 h 02 min

    Je suis passée également par Lima lors de mon voyage au Pérou en janvier, mais comme toi, je ne l’envisageaie que comme une escale, une étape ou un passage obligé.

    C’est une grande ville pas très agréable, et pourtant la météo quand j’y étais n’était pas aussi désastreuse que ce que tu raconte !

    Je n’ai pas été voir la mer, mais par contre j’ai visité deux musées archéologiques intéressant, dont un reconnu pour sa colelction d’art érotique (musée Rafael Larco).

    Ce qui est surprenant, quand on y réfléchit après coup, c’est qu’on en voit quasiement nul part ailleurs. Or cela existe. Je suppose que ces poteries sont cachées par censure … !

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