Reprenons. Nous étions à Arequipa, et on n’était pas très contents. Depuis notre arrivée, un sentiment étrange persistait, celui de ne pas être à notre place, celui d’être prisonnier d’un itinéraire déjà tout fait et qui surtout n’était pas le notre.
De retour du trek avorté au Canyon de Colca, déjà, il nous restait déjà une affaire à régler: nous faire rembourser.
Dans le bus qui nous ramenait en ville, nous étions tous les deux silencieux. On savait qu’il allait falloir se fâcher, car 2 heures auparavant, au téléphone, notre interlocuteur nous avait prévenu qu’il allait nous rouler (il n’a pas tout à fait dit “je vais vous rouler“, mais c’était tout comme) C’est pas qu’on soit trouillards, loin de là, mais on aime pas trop entrer en guerre. Et on aime encore moins se faire avoir.
Finalement, on s’en est bien sortit. On a une technique simple, avec Julien, imparable! Lui, très calme, discute, argumente poliment, et affiche brillamment sa très bonne éducation, celle qui lui dicte que quelque soit la situation, on ne s’énerve pas. Moi aussi j’ai appris tout ça, mais je l’oublie bien vite, et j’endosse dans ces instants là le costume du pitbull, la méchante, l’hystérique, celle qui crie, qui s’énerve, qui menace, qui fait trembler les meubles. L’un sans l’autre, ça n’aurait pas d’effet. L’un plus l’autre, on gagne à tous les coups. Et ça a marché une fois de plus.
Sauf que l’ennui, là, c’est que le gars qui nous avait vendu le trek était aussi le patron de notre Auberge de Jeunesse. Pas question après avoir fait un tel cirque de lui demander gentiment la clé de notre chambre pour aller nous coucher… Nous étions levés depuis 3h du matin, nous avions fait 7h de bus, marché un peu, mangé qu’à peine. Il était 18h, il faisait nuit, et en plus il pleuvait. Bref, c’est précisément dans ces moments là qu’on n’a pas du tout envie de faire le tour des logements, d’en visiter des crasseux, de négocier un prix exagéré, de vérifier que les sanitaires soient propres et tout le toutim… Fffff… journée de merde!
Finalement, on a trouvé un toit avant que le gros de l’orage n’arrive.
A l’abri, on a pu enfin poser nos sacs, et reposer nos têtes. En plus d’avoir perdu un toit, nous venions de perdre un itinéraire. Pour nous il n’était en effet plus question de continuer le circuit touristique de sud. Peut être qu’on se trompait, peut être qu’à Cuzco, Nazca ou Puno les rapports avec les gens ne seraient pas si faussés, mais on en doutait. Notre expérience des mois passés à barouder nous permet aujourd’hui de savoir ce que l’on aime ou pas. Et ce qu’on reniflait à Arequipa puait à plein nez à Cuzco.
Et puis le temps pressait. L’air de rien, on arrivait au bout du périple. Encore 3 mois qu’on ne pouvait ni allonger, ni étirer, ni transformer, 3 mois. Et 3 semaines au Pérou, pas un jour de plus. Le 21 mars, nous partirons aux USA, et autant nous avons déjà voulu repousser certains avions, autant celui ci il n’en est pas question. Il nous restait donc un peu plus de 2 semaines à organiser au Pérou.
Bien qu’échaudés, nous ne voulions pas partir du pays sur une mauvaise note, et en garder un mauvais souvenir. Alors on a regardé la carte, et on a vu qu’au nord de Lima, il y avait des villes aussi. Si! Ni une ni deux, on a donc filé en bus vers Lima.
Arequipa-Lima, c’est 16h de bus, et ça se passe de nuit. Tant mieux. Le bus au Pérou, c’est toute une affaire. Venant d’Argentine et du Chili, nous étions déjà habitués aux longs trajets, aux bus ultra confortables. Là, c’est pareil, le danger en plus. Apparemment les contrôles de sécurité ne sont pas les mêmes qu’ailleurs ici. Une compagnie avec des bus pourris et des chauffeurs bourrés peut tout à fait vendre ses billets à côté de la meilleure société de transport du pays.
Le jeu consiste donc à étudier un peu la chose avant sur Quelleestlameilleurecompagnie.com et ensuite de se lancer. (non, ne cherchez pas ce site, il n’existe pas!) Pour commencer, on a joué petit en misant sur la grosse compagnie nationale, à savoir Cruz del Sur. Les bus sont extraordinaires, il faut bien l’avouer. Le service est parfait, et on a même joué au Bingo avant de s’envoyer un repas tout à fait convenable. Les films sont de bonne qualité et la couverture sent fortement la lessive. Par contre, ça n’a pas empêché le chauffeur de conduire comme un taré à 2h du matin, sur une route de montagne, sinueuse et sans aucune visibilité. Comme quoi, on peut avoir une super compagnie, et un chauffeur complètement con. Se réveiller en pleine nuit dans un remake incarné du «Salaire de la Peur», ça vous tient éveillé pour tout le reste du trajet.
A Lima, nous n’avons fait qu’une étape, une nuit
Notre objectif est de continuer vers le Nord, et on reviendra dans la capitale de toutes façons pour prendre notre avion. Nous avions trouvé une Auberge dans le quartier de Miraflores. Sur le papier, on dit que c’est un des quartiers les plus chouettes de la ville, celui où il y a des belles résidences et des restaurants sympas. Et puis il y a la plage aussi. Bon, oui, la plage, elle était là, quelque part, derrière l’épais brouillard qu’on appelle Garua. Le Garua, c’est la brume qui vient de la mer et qui est bloquée par les montagnes. Ce n’est pas un phénomène exceptionnel, ça dure de novembre à mars, durant cette période on ne voit quasiment pas le soleil. Génial, et pas triste du tout :-) L’océan a alors une couleur gris-vert pas vraiment attirant, ne serait ce peut être que pour les quelques surfeurs venant casser de la vague.
Bon, puis avec toute cette brume, la chaleur est étouffante, humide. Le temps de faire l’aller-retour de l’auberge à la mer, on est trempés. C’est balot parce qu’on a rendu notre chambre, le soir nous repartons en effet pour une nouvelle nuit de bus. Départ en effet pour Huaraz, à 22h30. Arrivée le lendemain à 7h. Alors là, par contre, prendre un bus de nuit avec des horaires pareils, c’est bidon. Vraiment bidon. Ca veut dire trainer dans les rues de Lima jusqu’à 22h, et arriver le lendemain à Huaraz bien avant l’heure du check in des AJ !
Heureusement, les gens ici ne sont pas bêtes. Ils savent, et nous ouvrent facilement la porte, même à 7h du matin et même sans réservation. On peut prendre possession de la douche et du lit dés notre arrivée, et ça c’est du grand luxe!
A Huaraz, notre auberge est sympa, mis à part le fait qu’elle soit en travaux. C’est pas grave, qu’on s’est dit, de toutes façons on a l’intention de crapahuter dehors toute la journée, et puis le patron est tellement sympa. Sans compter que la nuit, les ouvriers aussi, ils dorment.
Huaraz est une ville située dans la Cordillère Blanche
La Cordillère Blanche, c’est une chaine de montagnes réputée pour les treks magnifiques que l’on peut y faire, puisqu’elle regroupe en effet plus d’une trentaine de sommets haut de plus de 6000m. Il parait qu’après l’Himalaya, c’est l’endroit au monde que les alpinistes aguerris préfèrent.
Malheureusement, nous ne pourrons en vérifier la véracité par nous même: il y a bien trop de nuages, et seuls quelques sommets nous montreront timidement leur cime enneigée. Huaraz nous rappelle un peu Pokhara, et ces montagnes que nous avons guettées des jours entiers. (sauf que là bas, on avait fini par les voir!)
La ville en elle même n’a pas d’intérêt architectural particulier. Et pour cause, elle a été totalement ravagée par un tremblement de terre en 1970. Tous les bâtiments coloniaux ont été détruits, les églises également, et ce sont donc des constructions plutôt disparates que nous trouverons dans la ville. Mais c’est pas moche, loin s’en faut. La place est accueillante, surtout le matin quand le soleil est là. Il fait alors bon, chaud, et l’ambiance est agréable. Des dames en costumes traditionnels sont assises en rondes, des lamas couchés à leurs côtés. Elles mangent. Ces dames, on les retrouve un peu partout dans la ville, assises sur le trottoir, au détour d’un carrefour. Assises par terre, elles mangent, toujours et quelque soit l’heure!
On se balade ensuite sur l’avenue principale
Il y a beaucoup de monde, quelque soit l’heure, ça grouille dans dans un brouhaha joyeux. Dans une petite rue en parallèle, on trouve des gens attablés derrière des machines à écrire. Ce sont les écrivains publics, ils tapent les documents officiels des citadins qui ne savent peut être pas écrire eux même.
Et puis, bien moins joyeux, nous croisons aussi beaucoup de pauvreté. Des gens mendient, ou dorment par terre. Une femme rentre dans le restaurant où nous mangeons. Elle est vraiment très maigre, semble affamée, son regard est vide. Elle nous offre des bonbons en échange de quelques pièces et ramasse les morceaux de manioc que nous n’avons pas mangé. Les maisons tout autour du centre ville témoigne de cet état d’urgence. Ici, la vie est difficile.
Dans le centre, il y a bien quelques agences touristiques, mais très peu. Et les péruviens que l’on croise sont presque étonnés de nous voir là. Ils nous regardent avec surprise avant de continuer leur route. Ceux que l’on arrête pour demander notre chemin nous répondent avec sympathie et simplicité. On échange toujours trois mots, d’où nous venons, comment trouvons nous la ville, le pays? C’est agréable et bienveillant.
Nous sommes allés faire une balade à l’extérieur de la ville
Une grande randonnée de 6h qui devait nous mener à 4000m d’altitude, à un point où le panorama serait parait il époustouflant. On n’a pas pu aller au bout malheureusement. Car à Huaraz, comme à beaucoup d’autres endroits du pays en cette saison, à partir de 13h, il pleut. Le ciel bleu magnifique du matin tourne au gris-noir en un instant, la température baisse, et il se met à pleuvoir à verse. A partir de 13H, donc, il n’y a plus moyen de rester dehors! Pas la bonne saison pour partir en trek…
Mais c’est pas grave, on a bien aimé être à Huaraz
Au lieu de partir en rando, on a exploré les quartiers de la ville. On est allés au Marché, on s’en est mis plein le nez, plein les yeux. Les odeurs là bas sont parfois terrifiantes! Et ce qu’on y voit aussi: les cochons d’Inde parqués à côté des poulets, vivants, c’est quand même bizarre. Qui ne savait pas qu’ici on mange du cochon d’Inde? Le cuy (prononcé «couille») est un met recherché! On avoue, on a gouté, pour pas mourir idiot. Bon, ça ressemble au lapin, et y’a pas d’quoi fouetter une mule!
Le marché en revanche regorge de fruits fabuleux, les étals sont multicolores, et s’étendent à perte de vue, c’est magnifique! Certains de ces fruits ne sont produits qu’ici, comme le Mamey, ou la petite tomate d’arbre. On a goûté le Mamey déjà, et on cherche encore la tomate :)
Pendant la balade, Julien en profite pour s’arrêter chez le coiffeur. On s’arrête au hasard, et il en ressort enchanté. La dame qui s’occupe de lui est vraiment une fée, la coupe est parfaite. Le prix achève de nous sonner, 5 soles, soit 10 balles! 1,5€.
On se dit que si cette dame travaillait dans nos pays, avec son talent, elle ferait fortune!
Et puis finalement, après 3 jours dans cette petite ville agréable, la pluie, et les travaux à l’auberge auront raison de nous. Nous avançons notre départ, et prenons notre bus le 11 mars.
Direction Trujillo, sur la côte Pacifique, en espérant que le soleil soit cette fois de la partie
Récits du voyage
- Arequipa en demi teinte
- Nous n’irons pas au Machu Picchu!
- En route pour le Pérou du nord
- Recette pour un Pérou réussi
- Pérou, le bilan
9 comments
Comment by maria
maria 15 March 2013 at 20 h 02 min
bon je vois que cette partie du voyage est laborieuse! allez le 21 est presque demain! bisouilles!
Comment by Nowmadz
Nowmadz 17 March 2013 at 13 h 39 min
Ça rame en effet en ce moment, et malgré la pluie, notre barque n’avance pas assez vite!
Comment by stef
stef 15 March 2013 at 22 h 05 min
Tenez bon, bientôt les US!!!! Ceci dit, dans ce récit, on sent que la fin de votre périple vous a réconcilié avec le Pérou. Bisous.
Comment by Nowmadz
Nowmadz 17 March 2013 at 13 h 38 min
Oui, ça nous console un peu, mais on sera définitivement passé a côté, ça n’aura pas pris!
Comment by Nadege
Nadege 16 March 2013 at 18 h 48 min
C’est bien beau toussa mais on aurai bien voulu voir Ju avec sa nouvelle coupe !!!!
Comment by Nowmadz
Nowmadz 17 March 2013 at 13 h 37 min
Il se cache!!!
Comment by Louou
Louou 17 March 2013 at 6 h 06 min
Il fait pas beau mais les cieux sont magnifiques et ca fait de belles photos :)
Comment by Nowmadz
Nowmadz 17 March 2013 at 13 h 37 min
Oui c’est vrai!!! On a eu plein de beaux ciels, plein de belles photos ;) le côté chiant de la pluie après, c’est que ça mouille !
Comment by Benoit(novomonde)
Benoit(novomonde) 2 August 2014 at 21 h 22 min
Aïiie… je passe maintenant sur votre article! Quelle pouasse d’y être passé pendant la saison des pluies… Vous avez vraiment enchainé les mauvaises expériences au Pérou!!!
De notre côté, on quitte Huaraz après plus d’une semaine, émerveillés par la beauté de la cordillère blanche! Je peux vous promettre que ce qui se cachait derrière les nuages pour vous, vaut vraiment le détour. En plus, on a trouvé les gens de Huaraz super sympas et souriants… avec le soleil ça aide peut-être un peu.
En tout cas si vous avez envie de faire des treks incroyables… revenez à Huaraz… Vous ne serez pas déçu ;-)
Sinon comment va la petite famille ;-)?